L’essence est à 211 baisas le litre (0,50 €). Comparativement à nos 1,50€/l, je ne trouve pas cela si bon marché, le pétrole étant sur place, et notre prix étant constitué de 60% de taxes. On rigole quand même en faisant le plein…


A Mascate, les premiers parcmètres. Dans le quartier de Mutrah, se garer devant la halle aux poissons, c’est gratuit.

Quelques restaurants ont deux entrées, l’une pour tout le monde, l’autre pour les familles (family entrance). La family entrance mène à un couloir bordé de portes ouvrant sur des petits salons clos, la famille peut ainsi se restaurer comme à la maison. « Fatima, les enfants, je vous emmène au resto ce soir, et c’est cool, ça sera comme si on était à la maison entre nous ! ». Et j’ai compris l’astuce. Le système permet aux femmes (voilées) de venir au restaurant sans subir le regard des non intimes (et non autorisés) sur leur corps de rêve et leur mine réjouie. Pas facile de manger relax quand on est voilée jusqu’aux dents !

Les femmes voilées complètement (le regard seulement visible) sont vraiment nombreuses (une sur quatre ou cinq ?). Les autres, qui ont le visage complètement dégagé (attention, ne pas voir un gramme de cheveu) sont donc carrément émancipées ! Celles qui dérogent encore sont soit des filoutes, soit des indiennes hindouistes, soit des touristes… La tenue des femmes, en public, est invariablement noire de la tête aux pieds. Elles peuvent évidemment être comme elles veulent en dessous de leur djelabah noire et ample, en pyjama, en string ou en jean. Finalement elles mettent leur tunique noire pour sortir, comme on met un manteau chez nous. Et impossible de savoir si elles ont des gros seins, des petits seins, un gros cul, un petit cul (c’est l’heure de l’apéri-cul lol), le vêtement les rend informes. Elles n’attirent donc pas les regards cupides mâle, ces s…. C’est sûr que dans ce monde-là, le désir est bien en berne. Balance ton quoi ?

Donc les femmes ont le droit de crever de chaud sous leurs tuniques noires. Pendant ce temps-là, les hommes paradent tout de blanc vêtus, n’absorbent pas les rayons du soleil et sont éclatants d’élégance avec leur keffieh sur la tête (ou leur turban, mais moins). Bref, la mode est peu évolutive. Je me souviens de l’entrée d’une mosquée de campagne, les hommes debout et blancs y pénétrant fièrement, les femmes, noires et rabougries, étant posées à l’abri du soleil comme des chèvres parquées. De loin j’ai d’abord cru que c’était un troupeau de chèvre. En conclusion, il y a du pragmatisme dans tout ça, on reconnaît facilement les genres : les hommes en blanc, les femmes en noir, et les touristes en bermuda 😊. Les indien(ne)s et autres nationalités non musulmanes mais habitantes, ne suivent évidemment pas le même mouvement. Aucune contrainte. La tolérance de cet islam hibadite…

Et pourtant, Oman revendique l’égalité des hommes et des femmes. Ajoutez un W ou retirez le O d’Oman, vous voyez bien que ce pays est pour les deux sexes, c’est lexical ! L’éducation scolaire est ouverte à tous, filles comme garçons, les demoiselles vont à l’université, ont accès au travail public, à des postes d’encadrement. Et puis les réseaux sociaux devraient aussi faire bouger les choses… Je vois évidemment tout cela d’un œil superficiel, avec ma propre culture. Je vois ce que je vois et j’interprète le peu que j’ai vu avec mes propres repères, qui ont aussi certainement de belles œillères. Ce qui est certain, c’est qu’un petit garçon élevé comme un roi, avec l’image de l’autorité paternelle et blanchement flamboyante, et qu’une petite fille qui voit sa mère voilée dès qu’elle sort et que l’on éduque dans le sens de la soumission, sont bien entendu conditionnés pour leur vie d’adulte. Respect des traditions et modernité, l’enjeu omanais est en partie là aussi. C’est évidemment lent à se décanter.


MASCATE, capitale du sultanat, certainement moins brillante que ses voisines Dubaï ou Abu Dhabi, moins clinquante surtout. C’est une volonté, une moindre arrogance et un peu moins de sous sans doute. A Mascate, on ne joue pas à la plus grosse, ni à la plus grande. La moitié de la population omanaise y vit, elle doit donc s’étendre et, sans prendre de hauteur (pas de gratte-ciel que ça me chatouille), c’est en largeur que ça se répand. Ça tombe bien, il y a la place. Aujourd’hui, cette ville d’étend sur 40 kms le long de la côte, il vaut mieux louer une voiture qu’un vélo. En fonction des baies, ce sont des petites villes qui s’agglomèrent. Pour relier tout ça, de nouvelles voies expresses s’emberlificotent. Si tu rates ta sortie, ce qui m’est déjà arrivé quelques fois, pas moyen de ralentir ou s’arrêter pour regarder la carte, alors merci Map.me ou Google map, mais quand il n’y a pas de copilote, c’est parfois un peu galère. Alors on rallonge les distances assez sensiblement, on se perd. N’ai-je pas dit un jour qu’un voyage réussi est un voyage où on se perd… Alors ce voyage semble bien parti. Mais bon, ici, c’est juste se perdre un peu, dans la zone urbaine, sur le bitume sans relief de l’expressway à 2, 3 ou 4 voies. Pas de panique…

Mon hôtel (Al Shorouk – parfaitement tenu par des indiens, excellent resto indien d’ailleurs – 35€ la nuit) est presque parfaitement situé à 5 minutes en voiture du quartier de Mutrah, sans doute le plus visité de la ville, le plus charmant avec son souk, son marché aux poissons, son port et quelques musées. Le front de mer en arc de cercle est une enfilade de boutiques, banques et restaurants qui fleurent bon le tourisme galopant mais encore bon enfant. Le souk, très touristique, regorge d’objets et « d’antiquités » où le bon goût est bien présent. C’est certainement ici qu’il faut acheter ses souvenirs. Je reconnais beaucoup de choses qui viennent d’Inde et les vendeurs ne contredisent pas. Les prix affichés sont élevés, le marchandage est obligatoire.

La halle aux poissons, reconstruite et bétonné, a certainement, du coup, perdu de son authenticité. Les touristes du matin y vont s’enthousiasmer et trouver que les thons sont beaux. Sortir à l’arrière pour regarder les pêcheurs vider les filets, quel massacre, les bancs sont pris au piège sans échappatoire possible. L’holocauste quotidien.

Les omanais sont fiers de leurs traditions, de leurs origines, de tout ce qui les a amené à ce qu’ils sont aujourd’hui, globalement économiquement prospères et politiquement préservés. Ces choses-là sont remarquablement (et sobrement) présentées dans des musées tout neufs ou des forts proprement rénovés. Ainsi à Mutrah, le Bait-al-Baranda (bait veut dire maison), aménagé dans une grande demeure centenaire, va même très loin dans le temps qui explique entre autres, les formations géologiques, le sable des plages, les dunes des déserts, les montagnes caillouteuses, les dinosaures du coin. Très bien fait et simplement expliqué. J’ai beaucoup aimé le petit musée Ghalya d’art moderne dans cette petite maison du bout de la baie. Il prend prétexte de l’évolution des mœurs (relative quand même) pour présenter une foultitude d’objets du quotidien omanais des années 50 à 80. J’aime ces ambiances. Une seconde partie est dédiée à l’art contemporain, en réalité une galerie vente de peintures. De très jolies choses à mon goût, mais hors budget.

On peut grimper en haut du petit fort tout près pour avoir une belle vue de la baie de Mutrah, qui fait malheureusement aussi office de grand port et d’accueil des paquebots à touristes. Ca gâche un peu la carte postale.

Je prends mon bâton, ma gourde et ma respiration, et gagne à pieds une autre baie, origine de la ville, le Vieux Mascate, à 3 ou 4 kms. S’y trouve le palais du sultan, fermé au public évidemment, mais on peut le voir depuis l’extérieur. Ses jardins donnent sur la mer, trois pauvres canons maigrelets sont pointés pour les cas d’attaque extra-terrestre. Je retiens le magnifique Bait-al-Zubair malheureusement envahi, au moment de ma visite, par une quantité incroyable de retraités allemands, plusieurs cars. Globalement, je trouve qu’il y a beaucoup d’allemands parmi les touristes, le ministère éponyme a dû réaliser une campagne de promotion active auprès des tours opérateurs germains. Et c’est à croire que tous les retraités allemands se sont donné rendez-vous à Mascate aujourd’hui ! Alors les guides gueulent en schleu et l’assistance qui n’y voit pourtant goutte et ne sait de quoi l’on parle, opine des « Ja, Ja ». Mais les groupes vont vite, il est bientôt midi, ces personnes-là doivent avoir faim et le temps du circuit est compté. Cela libère rapidement les espaces de cette immense maison traditionnelle arrangée thématiquement autour de l’artisanat, des coutumes, des costumes, des monnaies et timbres, etc. Et surtout cette magnifique annexe sur quatre étages où personne ne va, avec photos de Mascate, avant et maintenant, pièces réaménagées, vieux appareils-photos, vieilles radios, tout ce que j’ai aimé.

Je zappe les autres musées, j’ai bien donné non ? Tant pis le National Museum, tant pis le Musée franco-omanais… et longue vie au Sultan. Tchin !

J’ai envie d’aller me baigner, voilà deux jours que je n’ai pas trempé mes orteils. Titine me transporte tant bien que mal vers Qurm, autre quartier à 8 ou 10 kms. On change d’ambiance, ça sent l’élite et l’expatrié, quelques voitures sportives et des gazons ras et verts à faire pâlir les jardiniers du stade de Wembley. Je viens pourtant de voir un énorme tableau d’affichage qui demande d’économiser l’eau. Le message, comme d’habitude, ici comme là, n’est pas pour tout le monde… J’aboutis à un club privé, je ne peux pas accéder à la plage. Pour l’accès à la suivante, ce n’est pas possible non plus, tout le quartier est en travaux, routes comme édifices, ça ne chôme pas. J’arrive finalement à la très longue plage de Qurm, sable grisâtre, la mer est (très) basse et je vais donc tremper mes doigts de pieds en une longue ballade de fin de journée. Quelques grosses méduses sont échouées. Attention aux faux-pas.

Je suis de passage, je repasserai plus tard voir les autres quartiers, et surtout la grande mosquée qui a l’air formidable.


JUSQU’A SOUR…

Sortir de Mascate n’est pas compliqué, il faut juste prendre la bonne bretelle… Tout à coup, pof ! plus rien ! plus rien de la ville. L’urbanisation s’est arrêtée là… pour l’instant. L’expressway est aménagée au milieu des montagnes oranges. Magnifique paysage. Lors de mon trip vers Sour, environ 150 kms, j’essaie au maximum de sortir de la grande route, me rapprocher de la mer, trouver une route côtière, traverser les petits villages de pêcheurs. Parfois ça ne marche pas. En général, ça marche plutôt bien. Première étape à Qurajat, autrefois florissante, ravagée par un cyclone il y a une douzaine d’années, qui a du mal à s’en remettre. Moi je prendrais un typhon sur la figure, j’aurais du mal à retrouver ma fraîcheur et mon teint de jeune fille ! Arrêt café et visite du petit fort gentillet. Je vais me « perdre » à l’avant-poste côtier, le petit village de pêcheurs Sahil. Des enfants jouent sur la plage, la mer est loin, les vagues sont importantes. Les habitants entrent ou sortent de leur quartier par de petites allées vite coudées, donnant des airs de médina. Je constaterai toute la journée que les femmes ne sont pas en noir, pas autant qu’en ville.

Aujourd’hui c’est vendredi, jour du Seigneur local… et du pique-nique. Résultat, la côte est habitée par les familles venues voir si la mer est toujours là. Et elles sont plutôt bien équipées, tentes et transats. Impossible de se baigner tranquillement aujourd’hui. A Bimah, je m’arrête manger un byriani. Avec tout ce riz que j’ingurgite depuis le début de ce voyage, je me demande comment j’arrive encore à faire popo ! looooooooooooooooool. Tous ces grains de riz passés par ma tuyauterie et que l’on mettrait bout à bout, devraient bien pouvoir nous embarquer jusqu’à la lune… Sur la table du petit resto, café à disposition, café à la cardamome qui passe beaucoup mieux que celui de l’autre fois.

A Tiwi, puisque c’est jour férié et que ce doit être bondé, je zappe le Wadi Sham, j’y reviendrai en semaine. En revanche, je me laisse porter vers le Wadi Tiwi, commence à grimper en voiture, ma berline, si elle est de compétition, c’est en catégorie « veau de lait » ! A un moment ça ne passe plus. Un type du coin me dit que seuls les 4X4 peuvent y aller. J’abdique, range la Susuki et me mets en route à pieds. Le type me convainc de m’emmener au bout avec son 4X4 et ensuite je redescend à pieds. Uman est sympa et je ne serais pas allé bien loin sans lui, même à pieds, sans connaître l’aboutissement. Ca grimpe et descend sec, et je trouve que ça commence à faire loin pour revenir à pieds ensuite. Le temps d’Uman marche à l’envers. Au début il y en a pour 5 minutes seulement my friend, puis ensuite, plus que 10 minutes, 15 minutes après, on y est encore. Uman me promet la chute (d’eau) finale. Normal pour une chute. On arrête la voiture et emprunte un sentier dans les bananeraies. On enjambe les rigoles d’irrigation, c’est majestueux tout ça ! Je ne serais jamais arrivé là tout seul, et pourvu qu’Uman ne me lâche pas car je ne retrouverais pas le chemin du retour. Tout se passe bien. On arrive à la chute. La profondeur est vertigineuse. On peut se baigner au fond. 1) je n’ai pas mon maillot 2) pas envie de descendre avec des cordes et me casser en mille morceaux dans ce fond de vallée 3) et après il faudrait remonter argh 4) il n’est pas si tôt que ça et la nuit est à 18 heures. Uman me propose de me redescendre un peu en voiture. Je lui donne 5 ryals, il est content et moi aussi, et je retrouve ma voiture au bout de 30 minutes de marche. J’en prends plein les yeux.

Un type m’aide à faire demi-tour, pas envie de dégringoler dans le ravin. Je le prends en stop. C’est Mohamed Jahil. Il est du Bengladesh venu certainement faire l’esclave dans la construction. Ça fait quand même loin le Bengladesh, plus de 3.000 kms. Il y a aussi des filles qui viennent des Philippines, le double de la distance. Elles ne retournent pas voir leur famille tous les weekends ! Alors avec Mohamed Jahil, nous parlons du pays, Dacca, Chittagong, Cox Bazar…


A SOUR

Ma chambre de l’hôtel Oyo est encore parfaite et spacieuse. Le prix à la nuit, 24€, est parfait aussi. Oyo est une chaîne d’hôtels de catégorie moyenne (il n’y a pas moins à Oman), au prix raisonnable pour les standards omanais, et, pour ce que j’en ai vu, propres, grandes chambres et salles de bains, excellente literie, serviettes moelleuses, petits savons et PQ ! OYO est une chaîne hôtelière indienne, récente (2013) fonctionnant sur le principe de la franchise.

J’ai lu quelque part que Sour serait la plus jolie ville d’Oman. Du coup, j’y projette presque d’y finir mes jours. Du coup aussi, je suis un eu déçu. Mais j’attendais quoi ? Un petit village transformé en joyau à touristes, les murs pastels refaits chaque année, cafés ombragés à chaque coin de rue, bars à hôtesse accueillants et casinos rutilants, alcool à volonté et boutiques de merdouilles plus lucratives que l’épicerie d’avant, sorties à dos de chameau et agences de voyages ? Evidemment rien de tout ça, vous avez eu peur, on nous l’aurait changé ce sauvage… Je crache évidemment dans la soupe au curry, mais c’est un peu mort tout de même. Le cœur « touristique » mériterait des réaménagements, un coup de peinture et le passage des camions poubelle. Ca viendra peut-être pour être inscrit dans le plan quinquennal suivant.

La ville nouvelle et sa banlieue est d’ailleurs en chantier, ce qui n’améliore pas ma vision du jour. On refait les routes, on édifie des immeubles, on restructure des quartiers. Ca sera magnifique, comme ailleurs.

Se balader, regarder, sinon pas grand-chose à voir d’essentiel, chantier de construction de boutres (dhow) peut-être que vantent les brochures.

Un jeune couple belge passe deux semaines à Oman, camping sauvage de rigueur. Ca le fait. Ils ont loué leur matériel de camping à Mascate. Ils sont en mission de 6 et 9 mois au Sud-Soudan pour MSF et ont l’air pressés de repartir au plat pays.

Je vais lire sur la plage de Qahlat, un petit passage au Carrefour pour mon petit dej de demain, et une virée en voiture le long de la côte sud.

Retour en arrière pour Wadi Sham, à hauteur de la ville côtière Tiwi. Certainement une des plus jolies ballades possibles dans le coin. Un petit bateau embraque pour traverser la rive, jusqu’au début du sentier (1 ryal AR). C’est assez bien signalé, de toutes façons il faut remonter la rivière. Quelques enclos de légumes profitent de l’eau, carrés de carottes et ronds de potirons. Un couple de trentenaires français, elle d’origine asiatique, m’accompagne, ils habitent à Hong Kong. Il faut aller au bout, laisser ses affaires en toute confiance (et vlan le passeport, le fric et les clés de voiture, manque que l’écriteau « Servez-vous » !) et plonger dans l’eau, remonter le wadi jusqu’à une petite falaise. On pénètre ensuite (toujours dans l’eau) dans un couloir étroit (les claustros ferment les yeux) comme une machine IRM, et on aboutit à un gouffre extraordinaire avec chute d’eau et grosse arche rocheuse qui semble avoir été posée au-dessus de nos têtes. Que la Nature est grande !

Déjeuner à Tiwi, mes voisins de table sont français, pour une semaine seulement à Oman, avec guide-chauffeur, c’est plutôt mieux pour une si courte durée.

Je pars voir les tortues…

Portez-vous bien…